OPTIQUE CRISTALLINE - Diffraction par les cristaux

OPTIQUE CRISTALLINE - Diffraction par les cristaux
OPTIQUE CRISTALLINE - Diffraction par les cristaux

Le phénomène de diffraction de la lumière par un réseau est bien connu. Il suffit, pour s’en convaincre, de regarder la lumière d’une lampe à travers un voilage. Pour que ce phénomène soit important, il faut que la longueur d’onde du rayonnement et le pas du réseau soient du même ordre de grandeur. La propriété caractéristique de la matière cristallisée est d’être la répétition d’un motif atomique par les translations d’un réseau triplement périodique. Elle doit donc pouvoir diffracter les rayonnements dont la longueur d’onde est de l’ordre des distances interatomiques dans la matière.

Cette expérience fondamentale a été effectuée pour la première fois en 1912 par W. Friedrich et P. Knipping sous la direction de M. von Laue. À cette époque, la nature réticulaire des cristaux était connue mais non les valeurs des distances interatomiques, non plus que la nature exacte des rayons X, découverts par Röntgen en 1895. Friedrich, Knipping et von Laue envoyèrent un pinceau de rayons X sur un cristal de sulfure de zinc et constatèrent la présence de taches de diffraction sur une plaque photographique placée derrière le cristal. La nature ondulatoire des rayons X était ainsi démontrée et, la nature réticulaire des cristaux confirmée, il devenait possible d’évaluer les distances atomiques en fonction des valeurs des longueurs d’onde des rayonnements diffractés. Cette expérience, qui a valu à M. von Laue le prix Nobel en 1914, a eu une importance déterminante pour l’étude des propriétés des matériaux.

La diffraction des rayonnements est en effet le meilleur outil pour la détermination de l’arrangement des atomes et des molécules dans les matériaux solides, cristallisés ou amorphes, liquides et gazeux, des défauts de cet arrangement, des quantités relatives des différentes phases dans un état à plusieurs phases, des transformations de phase, etc. La diffraction des rayons X permet d’atteindre non seulement les dimensions de la maille, mais encore la nature des liaisons chimiques et la forme des molécules. Toutes ces informations sont d’une importance fondamentale pour l’étude des propriétés des matériaux qui dépendent soit de leur structure atomique soit des défauts de cette structure.

La très grande majorité des matériaux est cristallisée; aussi la radiocristallographie est-elle d’une utilisation courante aussi bien en physique qu’en chimie, en chimie physique, en métallurgie en biochimie, en minéralogie et en pétrographie, etc.

1. Étude géométrique de la diffraction

Loi de Bragg

Les rayons X sont des ondes électromagnétiques dont les longueurs d’onde sont inférieures au nanomètre (1 nm = 10-3 猪m). Les rayons 塚, les ondes lumineuses et les ondes radio sont également des ondes électromagnétiques, mais de longueur d’onde plus courte pour les rayons 塚, plus longue pour les ondes lumineuses et les ondes radio. Le tableau 1 donne les gammes de longueurs d’onde des différentes catégories d’ondes.

Les ondes électromagnétiques ne sont pas les seules qui peuvent interférer avec la matière. L. de Broglie a montré en effet, en 1925, qu’à tout flux de corpuscules en mouvement on peut associer une onde de longueur d’onde:

h est la constante de Planck (h = 6,624 憐 10-34 joules/seconde), v la vitesse des particules et m leur masse. La diffraction des neutrons et des électrons par les cristaux apporte ainsi des renseignements très utiles, complémentaires de ceux apportés par la diffraction des rayons X.

Un cristal est formé par la répétition d’un certain motif atomique ou maléculaire par la translation d’un réseau tridimensionnel (cf. CRISTAUX - Cristallographie). Chacun de ces atomes constitue un centre diffractant pour tout rayonnement incident. La nature de l’interaction sera exposée plus loin.

Le réseau tridimensionnel peut être décrit par l’empilement d’une infinité de familles de plans réticulaires parallèles et équidistants. On considère une onde plane (formée par des rayons X, des électrons ou des neutrons) incidente sur l’une de ces familles de plans (fig. 1) et baignant tous les atomes du cristal. Chacun joue le rôle d’un émetteur et est la source d’une onde diffusée dans toutes les directions de l’espace. Toutes ces ondelettes interfèrent et, pour que l’intensité totale du rayonnement diffusé dans une direction donnée ait une intensité non négligeable, il faut qu’elles soient en phase.

La loi de Descartes montre que la seule direction pour laquelle les ondes diffusées par tout point du premier plan sont en phase est celle qui fait avec ce plan un angle égal à l’angle d’incidence.

Une partie seulement du rayonnement incident est réfléchie par le premier plan, le reste tombe sur le deuxième plan par lequel il sera à son tour partiellement réfléchi. Toutes les ondes diffusées par ce deuxième plan sont de même en phase si leur vecteur d’onde fait avec lui un angle égal à l’angle d’incidence. Pour que l’intensité totale diffusée soit importante, il faut en outre que ces ondes soient en phase avec celles diffusées par le premier plan. Il suffit de considérer les ondes diffusées par deux points particuliers, A et B, appartenant aux deux premiers plans et d’écrire que la différence de marche de leurs trajets entre deux plans d’onde est:

d est l’équidistance des plans réticulaires et la longueur d’onde; n est appelé l’ordre de la réflexion. Comme tous les plans sont équidistants, les ondes qu’ils réfléchissent dans la direction qui vait l’angle avec la leur sont en phase et les amplitudes de leurs ondes s’ajoutent.

L’équation (2), qui exprime la loi de Bragg , montre que les seuls angles d’incidence pour lesquels l’onde se réfléchit sur une famille de plans d’un réseau tridimensionnel correspondent aux valeurs entières de n ; ils forment une suite discrète et limitée car sin devant être inférieur à 1, n est au plus égal à 2 d /. Pour cette raison, on parle souvent de réflexion sélective des rayonnements par les cristaux.

Aucune hypothèse n’a été faite jusqu’à présent sur le contenu atomique du motif répété par les translations du réseau car l’expression de la loi de Bragg en est indépendante, mais il n’en est pas de même pour l’amplitude de l’onde diffractée, ainsi qu’on peut le voir sur un exemple simple. S’il y a un seul atome par maille, on peut placer les nœuds du réseau au centre des atomes et les plans réticulaires sont aussi des plans atomiques. S’il y a plus d’un atome par maille, les plans atomiques peuvent être plus serrés que les plans réticulaires. Supposons ainsi que l’empilement des plans soit obtenu par la répétition d’un groupe de deux plans d’espacement d /2 et dont les contenus atomiques soient identiques, mais avec une répartition différente des atomes: les deux plans jouent des rôles différents dans la structure, et la distance réticulaire qui intervient dans l’expression de la loi de Bragg est d (fig. 2). Lorsque les ondes réfléchies par deux plans de même nature sont en phase, celles réfléchies par deux plans de nature différente ont une différence de phase de n/2: si l’ordre de la réflexion est pair, leurs amplitudes s’ajoutent, mais s’il est impair, elles sont en oppositions de phase et l’amplitude totale réfléchie est nulle. On dit qu’il y a extinction des réflexions d’ordre impair.

Les valeurs des angles de Bragg permettent de déterminer les dimensions et la forme de la maille élémentaire du cristal. Les amplitudes des ondes réfléchies permettent de déterminer la structure atomique du motif. Ces deux remarques résument les deux modes principaux d’utilisation de la diffraction des rayonnements et leurs applications.

Étude dans l’espace réciproque

L’approche de Bragg pour l’interprétation de la diffraction des rayonnements par les cristaux n’est pas seule que l’on puisse envisager. Celle due à M. von Laue est tout aussi utilisée et doit être décrite ici. Elle fait appel à la notion de réseau réciproque associé au réseau cristallin (cf. CRISTAUX - Cristallographie). On peut rappeler que le réseau réciproque est construit à partir de trois vecteurs de base だ, ち, ぢ définis par les relations suivantes, en fonction des vecteurs de base , , du réseau cristallin:

La propriété fondamentale du réseau réciproque est qu’à toute famille de plans réticulaires du réseau cristallin on peut associer un nœud du réseau réciproque défini ainsi:

– le vecteur ねhkl joignant l’origine du réseau réciproque à ce nœud est perpendiculaire à la famille de plans considérée;

– la longueur Nhkl de ce vecteur est inversement proportionnelle à la distance réticulaire de la famille de plan:

– les coordonnées h, k, l du vecteur ねhkl dans l’espace réciproque sont les indices de Miller de la famille de plans.

Il a été remarqué plus haut que tous les atomes du cristal sont des centres diffractants pour le rayonnement incident. Pour que l’onde totale réfléchie dans une direction donnée ait une amplitude non négligeable, une condition nécessaire est que soient en phase les ondes diffusées dans cette direction par tous les nœuds du réseau sur lequel est construit le cristal. Soient, en particulier, deux nœuds consécutifs sur une rangée donnée (fig. 3), face="EU Arrow" ひ0 et ひh des vecteurs unitaires dans les directions incidente et réfléchie, respectivement; la condition d’accord de phase entre les ondes réfléchies s’écrit ici:

est le vecteur joignant les deux nœuds du réseau direct ; pour que, dans la direction considérée, l’onde globale réfléchie par l’ensemble du cristal ait une amplitude non négligeable, il faut que l’expression (4) soit satisfaite pour toutes les translations r du réseau direct. Elle peut s’écrire également:

On peut remarquer que le vecteur (h0)/, dont le module est homogène à l’inverse d’une longueur, est un vecteur de l’espace réciproque. Si h, k, l sont ses coordonnées, u, v, w celles de , il vient, d’après les relations (3):

Comme u, v, w, n sont des nombres entiers, h, k, l doivent nécessairement être entiers afin que l’expression soit satisfaite pour tout vecteur du réseau direct. Le vecteur (h0)/, appelé vecteur de diffusion , est donc un vecteur période du réseau réciproque. Il est représenté par le vecteur OHsur la figure 4. Il lui est associé une famille de plans réticulaires de l’espace direct dont la distance réticulaire est égale, d’après (4), à 1/OH. La figure 4 montre, d’autre part, que OH est égal à 2 sin /, où est l’angle de 0 et h avec la direction des plans réticulaires normaux à OH 轢. On en déduit:

et l’on retrouve la loi de Bragg (1). L’un et l’autre raisonnement sont donc tout à fait équivalents. Celui qui vient d’être fait montre qu’à toute réflexion d’un rayonnement sur une famille de plans réticulaires on peut faire correspondre le nœud associé du réseau réciproque. Lorsque la réflexion est du même ordre, ce nœud est le n -ième sur la rangée passant par le nœud et l’origine du réseau réciproque, les indices h, k, l de la réflexion ne sont pas premiers entre eux et la distance réticulaire dhkl de l’expression (8) correspond à une famille de plans fictifs n fois plus serrés que les plans réels et sur lesquels la réflexion serait du premier ordre.

Le résultat obtenu peut se traduire par une construction géométrique due à P. P. Ewald: soit IOun vecteur de module égal à 1/, de direction parallèle à celle de l’onde incidente et dont l’extrémité O est l’origine du réseau réciproque. On trace la sphère de centre I et de rayon 1/ (fig. 5), appelée sphère de réflexion, ou sphère d’Ewald. Á tout nœud H du réseau réciproque qui se trouve sur la sphère correspond un faisceau réfléchi sur la famille de plans réticulaires dont les indices sont les coordonnées hkl du nœud H. On remarquera que pour une direction incidente quelconque la sphère ne coupe en général aucun nœud du réseau réciproque.

2. Interaction entre le rayonnement et la matière

Rayons X

L’émission des rayons X dans les tubes utilisés en diffraction est obtenue par bombardement d’une cible métallique, ou anticathode, par un faisceau d’électrons accélérés par une différence de potentiel de quelques dizaines de kilovolts. Le spectre émis (fig. 6) est constitué par la superposition d’un spectre continu dû au rayonnement de freinage des électrons dans le matériau constituant la cible et d’un spectre de raies caractéristiques de ce matériau dû aux réorganisations des couches électroniques des atomes après que des électrons aient été chassés des couches profondes par le bombardements incident sur la cible. Les rayons sont également émis par des électrons parcourant une trajectoire courbe. C’est le rayonnement synchrotron .

Le principe de l’interaction des rayons X avec la matière découle des lois fondamentales de l’électromagnétisme. Un électron recevant une onde électromagnétique est soumis à un champ électrique alternatif, il oscille et rayonne comme une antenne: il émet à son tour une onde électromagnétique. Si celle-ci a même fréquence que l’onde incidente, on dit qu’il y a émission cohérente, ou diffusion Rayleigh. Ce phénomène est très général, c’est, par exemple, celui qui est à l’origine du bleu du ciel par diffusion de la lumière sur les particules de la haute atmosphère. Tous les phénomènes de diffraction étudiés sont dus à la diffusion cohérente des rayons X. Si l’onde diffusée a une fréquence différente, on dit qu’il y a émission incohérente; l’onde incidente – ou le photon qui lui est associé – a échangé de l’énergie avec l’électron; c’est l’effet Compton.

L’amplitude de l’onde diffusée de manière cohérente par un électron dans une direction quelconque est donnée par la formule de J. J. Thomson:

où E0 est l’amplitude de l’onde incidente, 益 sa fréquence, k h le vecteur de l’onde diffusée, r la distance du point d’observation à l’électron, e et m la charge et la masse de l’électron, c la vitesse de la lumière, 祥 l’angle entre le champ électrique つ0 de l’onde incidente et le vecteur d’onde de l’onde réfléchie (fig. 7). Si l’onde incidente n’est pas polarisée, l’intensité de l’onde diffusée est égale à:

2 étant l’angle entre les vecteurs d’onde des ondes incidente et diffusée.

L’interaction des photons X avec les atomes peut se manifester de trois manières différentes:

– le photon est diffusé sans changement de fréquence, l’atome étant passé ou non par un état intermédiaire excité;

– le photon est diffusé avec changement de fréquence (effet Compton);

– le photon est absorbé et chasse un électron hors de l’atome: c’est l’absorption photoélectrique . La probabilité de capture du photon est d’autant plus élevée que l’atome est plus gros et que l’énergie h 益 du photon est plus voisine de l’énergie En de liaison d’un électron de l’atome: si h 益 麗 En , il n’y a pas absorption; si h 益 麗 En , la probabilité est très grande; elle décroît ensuite quand h 益 devient très supérieur à En . La courbe de variation du coefficient d’absorption des rayons X par une espèce atomique donnée en fonction de la fréquence des photons présente, par suite, des discontinuités appelées arêtes d’absorption . Il en est de même pour les variations du coefficient d’absorption en fonction du numéro atomique pour une fréquence donnée.

L’amplitude A de l’onde diffusée sans changement de fréquence par un atome s’obtient par addition des amplitudes des ondes diffusées par chacun des électrons de l’atome en tenant compte de leurs déphasages respectifs:

où 福 ( ) est la densité électronique (somme des carrés des modules des fonctions d’ondes de tous les électrons de l’atome) et un vecteur de position, rapporté au centre de l’atome pris comme origine des phases. L’intégrale caractérise l’atome et est appelée facteur de diffusion atomique f . Lorsque la direction dans laquelle on étudie la diffusion coïncide avec la direction incidente (h = 0), les amplitudes diffusées par tous les électrons sont en phase et f est égal au nombre d’électrons Z. Pour toutes les autres directions, il lui est inférieur par suite des interférences destructives entre les ondes diffusées par les différents électrons. Dans un cristal comprenant des atomes légers et des atomes très lourds, la contribution de ces derniers au phénomène de diffraction est prépondérante.

La relation (11) s’applique également à l’amplitude diffractée par une collection d’atomes, un cristal, par exemple. On peut remarquer qu’elle s’exprime par une opération mathématique appelée transformée de Fourier dont les propriétés sont bien connues. Si l’objet diffractant est constitué par une collection d’atomes, la densité électronique peut s’écrire:

où 福n est la distribution électronique autour de l’atome n dont la position est repérée par le vecteur n . L’expression (11) s’écrit alors:

en posant:

f n est le facteur de diffusion atomique de l’atome n .

Si l’objet diffractant est, de plus, un cristal, il est triplement périodique et il en est de même de sa densité électronique. L’une des propriétés des transformées de Fourier est que celle d’une fonction périodique est nulle partout sauf aux nœuds du réseau réciproque associé. Ceci confirme la condition géométrique de diffraction: le vecteur de diffusion = (h0)/ doit être une translation du réseau réciproque; de plus les amplitudes des faisceaux diffractés sont proportionnelles aux coefficients du développement en série de Fourier de la densité électronique , ainsi qu’on va le montrer. Soit j le vecteur de position de l’atome n dans la maille à laquelle il appartient et k le vecteur de position de cette maille. On a n = j + k . Comme le contenu de toutes les mailles est identique, par définition de l’état cristallin, l’expression (13) s’écrit:

(somme étendue à toutes les mailles du cristal), où:

(somme étendue à tous les atomes de la maille). L’expression (16) montre que l’amplitude A n’a effectivement une valeur importante que si est un vecteur du réseau réciproque; elle est proportionnelle au facteur de structure Fh , c’est-à-dire aux coefficients du développement en série de Fourier de la densité électronique:

(somme étendue à toutes les translations du réseau réciproque); 益0 est le volume de la maille du réseau cristallin.

Il est donc possible de remonter des intensités des taches de diffraction mesurées expérimentalement à la carte de densité électronique, c’est-à-dire à la structure atomique. C’est là l’une des applications les plus importantes de la diffraction des rayons X. Le calcul est rendu difficile par le fait que les intensités ne permettent d’obtenir que les modules des facteurs de structure Fh .

L’application de l’expression (11) au calcul de l’amplitude totale diffractée par un cristal nécessite l’hypothèse que l’amplitude de l’onde incidente à la même valeur pour tous les centres diffractants. Cette hypothèse n’est valable que pour un cristal très petit ou pour un cristal formé d’une mosaïque de petits cristallites. Dans le cas contraire, une théorie plus évoluée est nécessaire, c’est la théorie dynamique de la diffraction des rayons X, développée par C. G. Darwin, P. P. Ewald, M. von Laue.

Neutrons

La première expérience de diffraction d’un faisceau de neutrons par un cristal a eu lieu en 1936 en utilisant une source radioactive radium-béryllium. Les sources radioactives sont toutefois très faibles et les expériences de diffraction sont faites depuis 1945 à l’aide des neutrons produits dans un réacteur atomique. Ceux-ci sont émis au cours des réactions de fission; ils sont très rapides et ont une grande énergie. La longueur d’onde qui leur est associée par la relation (1) est très petite et, par suite, mal adaptée pour les études de diffraction. Si l’on fait passer les neutrons dans du graphite ou de l’eau lourde, de manière qu’ils subissent un grand nombre de chocs, il se produit un éauilibre thermodynamique des vitesses. Leur vitesse quadratique moyenne est liée à la température thermodynamique du milieu ralentisseur par la relation:

Les relations (1) et (19) montrent que la longueur d’onde moyenne associée est:

Pour une température égale à 0 0C, la longueur d’onde est égale à 15,5 nm; elle est de l’ordre de grandeur des distances inter-atomiques et des longueurs d’ondes des rayons X utilisés en radiocristallographie (15,4 nm pour une anticathode de cuivre, par exemple). La distribution des bitesses suit la loi de Maxwell et le spectre des neutrons émis est par suite polychromatique. Il n’y a pas, comme dans le cas des rayons X, de raies caractéristiques monochromatiques. Il est nécessaire, pour beaucoup d’expériences de diffraction, d’utiliser un rayonnement monochromatique. La méthode la plus couramment utilisée maintenant est d’isoler les neutrons réfléchis dans une certaine direction par un premier cristal, appelé monochromateur. La loi de Bragg donne la longueur d’onde des neutrons choisis en fonction de l’angle de réflexion.

L’interaction entre les neutrons et la matière est de nature très différente de celle des rayon X, ce qui fait l’intérêt de la diffraction des neutrons et se trouve à l’origine de ses principales applications.

Cette interaction se manifeste essentiellement selon deux modes: le mode nucléaire et la mode magnétique.

Il y a d’abord une interaction à courte distance entre les neutrons et les noyaux atomiques . Le calcul du rapport du nombre de neutrons diffractés au flux de neutrons incidents, ou section efficace , est compliqué et nécessite une connaissance approfondie des processus nucléaires. Les sections efficaces qui sont proportionnelles au carré du module de l’amplitude de l’onde associée diffractée par le noyau sont en général connues de manière empirique. Les principales différences entre les amplitudes de diffraction pour les rayons X et les neutrons sont les suivantes:

– Comme la dimension des noyaux est beaucoup plus petite que celle des longueurs d’onde utilisées habituellement, l’amplitude de diffraction est indépendante de l’angle de diffraction.

– La section efficace est fonction des propriétés du noyau et dépend du nombre de nucléons qu’il contient, mais n’est pas liée directement au numéro atomique, alors que les facteurs de diffusion atomique pour les rayons X sont de l’ordre de numéro atomique. Le tableau 2 compare les amplitudes de diffraction de différents atomes pour les neutrons et les rayons X. On remarquera que les atomes peuvent avoir des amplitudes de diffraction comparables à celles des atomes lourds pour les neutrons alors que ce n’est pas le cas pour les rayons X.

– L’amplitude de diffraction peut être très différente pour différents isotopes d’un même élément, ainsi que le montre le tableau 2 dans le cas du fer.

Il y a d’autre part interaction entre le moment magnétique du neutron et celui des atomes ou ions. Lorsque celui-ci est important, comme dans le cas des atomes ferro-magnétiques, il est d’origine électronique. L’amplitude de diffraction, comme les facteurs de diffusion pour les rayons X.

Électrons

La première expérience de diffraction des électrons a été effectuée en 1926 par Davisson et Germer; elle apportait la démonstration expérimentale de la relation de L. de Broglie (1) qui associe une onde à un faisceau de particules en mouvements.

Les faisceaux électroniques sont obtenus par émission à partir d’un filament chauffé et accéléré par une haute tension. Une optique à lentilles électrostatiques ou électromagnétiques permet de concentrer les faisceaux sur l’objet à étudier (fig. 8). L’énergie cinétique des électrons est proportionnelle à la chute de tension V qui leur est appliquée:

Les relations (1) et (2) montrent que la longueur d’onde associée au faisceau d’électrons est:

Comme la haute tension V peut être stabilisée avec précision, les faisceaux d’électrons sont monocinétiques. On voit qu’il y a là une différence avec les sources de neutrons qui sont toujours polycinétiques.

Pour une tension appliquée de 100 kV, la longueur d’onde associée est de 3,7 猪m en tenant compte des corrections relativistes. Elle est très courte et le rayon de la sphère d’Ewald très grand (fig. 5); celle-ci est assimilable en première approximation à son plan tangent. Il coupe en général un grand nombre de nœuds de l’espace réciproque et l’on pourra, par suite, observer un grand nombre de taches de diffraction simultanément, ce qui n’est pas le cas pour les rayons X. La figure 9 donne un exemple de cliché ainsi obtenu. L’ensemble des taches donne une image du plan (001) de l’espace réciproque d’un cristal de mica.

3. Méthodes utilisant la diffraction des rayonnements

Il existe plusieurs procédés pour satisfaire la condition de diffraction de Bragg qui, en général, pour une orientation quelconque du cristal dans le faisceau incident, n’est pas remplie.

Méthode de Debye-Scherrer ou méthode des poudres

Elle consiste à réduire l’échantillon en poudre. Il y a alors une distribution statistique de cristallites ayant toutes les orientations possibles et, parmi ceux-ci, un grand nombre satisfont à la condition de Bragg pour toutes les familles de plans réflecteurs dont la distance réticulaire est supérieure à/2. Pour une famille donnée, l’ensemble des faisceaux réfléchis constitue un cône dont l’axe est la direction des rayons incidents et dont le demi-angle au sommet est deux fois l’angle de Bragg (fig. 10). Les faisceaux réfléchis peuvent être recueillis sont dans un compteur, soit sur un film photographique placé dans une chambre cyclindrique dont l’axe est perpendiculaire à la direction du faisceau incident. La figure 11 montre la trace des faisceaux réfléchis sur le film. La mesure de la position des anneaux permet, à l’aide de la relation de Bragg, de calculer les distances réticulaires des différentes familles de plans réflecteurs. On peut en déduire les paramètres cristallins et le mode de réseau. D’une manière générale, l’ensemble de ces distances réticulaires constitue une véritable fiche signalétique du matériau et permet son identification très rapide, même avec une quantité très faible de matière.

La précision de la méthode est améliorée en utilisant un rayonnement monochromatique et en focalisant, par réflexion sur un premier cristal courbé, par exemple, le faisceau de rayons X (monochromateur ).

Méthode de Laue

Elle consiste à utiliser un rayonnement polychromatique – spectre continu dans le cas des rayons X – incident sur un monocristal fixe (fig. 12). On oriente, en général, une face importante du cristal perpendiculairement au faisceau de rayons X. Les différentes familles de plans réticulaires donnent lieu à une tache de diffraction s’il se trouve dans le rayonnement incident une longueur d’onde telle que soit satisfaite la condition de Bragg, compte tenu de l’angle entre la famille de plans et la direction incidente. Les taches de diffraction dues aux différents plans correspondent, par suite, en général, à des longueurs d’onde différentes et inconnues. Cette méthode ne permet donc pas de mesurer les distances réticulaires. Elle permet, en revanche, et c’est dans ce but qu’elle est utilisée, de mettre en évidence les symétries cristallines: si la direction du faisceau incident est parallèle à un axe de symétrie ou à un plan de symétrie du cristal, la figure formée par l’ensemble des taches de diffraction présente la même symétrie (fig. 13). Il est possible ainsi de trouver les éléments de symétrie d’un cristal inconnu, mais aussi d’orienter un cristal connu à l’aide de ses éléments de symétrie.

Méthode du cristal tournant

Elle consiste à animer un monocristal d’un mouvement de rotation autour d’une rangée importante. Le faisceau incident est monochromatique et perpendiculaire à l’axe de rotation. Les différentes familles de plans réflecteurs sont amenées successivement en position de réflexion. La condition de diffraction (5) appliquée à la rangée autour de laquelle tourne le cristal s’écrit:

ou a est le paramètre de la rangée et 祥 l’angle entre le faisceau réfléchi et l’axe de la rangée.

La condition (23) montre que les faisceaux réfléchis successivement par les différentes familles de plans réflecteurs sont situés sur des cônes dont l’axe est parallèle à la rangée (fig. 14). On reçoit en général ces faisceaux sur un film photographique placé dans une chambre cylindrique dont l’axe coïncide avec l’axe de rotation du cristal et, par suite, est parallèle à la rangée. Les taches de diffraction se répartissent sur des strates correspondant à l’intersection des cônes et du film. La figure 15 en donne un exemple.

La mesure des distances entre strates sur le film permet de calculer à l’aide de (23) le paramètre de la rangée autour de laquelle le cristal a tourné.

Mesures des intensités

Les trois méthodes décrites plus haut permettent de déterminer la symétrie d’un cristal et les paramètres de la maille cristalline. L’étude de la structure cristalline nécessite la mesure précise des intensités des taches de diffraction. Cette mesure peut se faire soit par photométrie de la tache sur un film photographique, soit à l’aide d’un diffractomètre et d’un compteur. On appelle diffractomètre un goniomètre sur lequel on peut régler la position angulaire du cristal et du compteur de manière à mesurer l’intensité du faisceau réfléchi par n’importe quelle famille de plans réflecteurs. Les diffractomètres modernes sont automatiques: un microordinateur calcule toutes les positions angulaires et pilote les moteurs commandant les déplacements du cristal et du compteur.

Les procédés photographiques gardent toutefois leur intérêt car ils permettent de comparer simultanément les intensités d’un grand nombre de taches. Sur un cliché de cristal tournant, il arrive que pousieurs familles des plans réflecteurs ayant même distance réticulaire donnent lieu à des taches qui se superposent. Il n’est alors plus possible de mesurer leurs intensités séparément. Plusieurs procédés sont utilisés pour pallier cet inconvénient; l’un d’eux consiste à animer le film d’un mouvement de translation parallèle à l’axe de la chambre pendant la rotation du cristal (chambre de Weissenberg). Deux taches ne peuvent alors se produire au même endroit et le cliché obtenu donne une image de l’espace réciproque associé au cristal.

4. Applications de la diffraction

Diffraction des rayons X

Détermination du groupe d’espace

Ainsi qu’il a été vu plus haut, la diffraction des rayons X permet tout d’abord de déterminer le groupe de symétrie d’orientation (avec la méthode de Laue) et les paramètres de la maille cristalline (par les méthodes de Debye-Scherrer et du cristal tournant). Elle permet aussi de déterminer le groupe de symétrie de position, ou groupe d’espace. Il a été montré (cf. CRISTAUX Cristallographie) que les opérateurs de symétrie qui permettent de ramener l’édifice atomique en coïncidence avec lui-même sont des axes de rotation hélicoïdaux associant une translation à une rotation. La présence de ces axes hélicoïdaux peut être mise en évidence sur les diagrammes de rayons X par l’absence de certaines taches, ou extinctions, ainsi qu’on peut le montrer par un exemple. Le plus simple est celui de l’axe 21 qui correspond à une rotation de 神 associée à une translation de /2, étant le paramètre de la rangée autour de laquelle se fait la rotation. On voit que l’opérateur de symétrie fait correspondre à un plan atomique perpendiculaire à l’axe un deuxième plan dont le contenu atomique est le même mais qui est décalé de /2 et tourné de 神 et, par suite, ne joue pas le même rôle dans la structure et ne se déduit pas du premier par une translation du réseau . On a vu au début de cet article qu’il en découle une extinction des taches de réflexion d’ordre impair sur cette famille de plans réticulaires. En effet, les amplitudes des ondes réfléchies par deux plans successifs sont alors en opposition de phase et se compensent; le facteur de structure correspondant est nul.

Détermination des structures cristallines

L’application principale des rayons X et la plus spectaculaire, est la détermination des structures cristallines. L’une des premières structures qui ait été déterminée, et l’une des plus simples, est celle du chlorure de sodium, par Bragg, en 1914 (fig. 16). Depuis, un nombre considérable de structures ont été déterminées, des plus simples jusqu’aux plus compliquées comme celle des protéines (hémoglobine, lysozyme, etc.). La connaissance des structures cristallines a apporté une contribution très importante à l’étude des propriétés chimiques des corps. Par exemple, elle a complètement révolutionné la chimie des silicates en introduisant une classification simple et logique basée sur les modes d’accolement des tétraèdres Si4. Elle permet d’établir la répartition de la densité électronique, puis de préciser la nature des liaisons chimiques dans tous les composés.

La connaissance de la structure joue, d’autre part, un rôle important dans l’étude des grosses molécules organiques. On peut, en effet, souvent faire l’hypothèse que la structure de ces grosses molécules ne dépend pas de l’état physique liquide ou solide. La détermination des structures atomiques est ainsi un outil très précieux pour l’étude des composés à intérêt biologique.

L’équation (18) exprime le principe de la détermination des structures cristallines. La difficulté provient de ce que les mesures d’intensité ne permettent d’obtenir que les modules des facteurs de structures Fh . Cela complique considérablement les calculs, mais la puissance des ordinateurs modernes et les progrès dans les méthodes de calcul ont permis de les rendre plus rapides. On peut ainsi obtenir une répartition de la densité électronique à l’intérieur du cristal et remonter à la position des atomes. La figure 18 montre la structure tridimentionnelle d’une enzyme. Plus de 20 000 architectures de petites molécules organiques et environ 120 architectures de protéines ont été établies par radiocristallographie.

La figure 19 donne un exemple de projection de la densité électronique pour un composé inorganique simple après affinement de la structure.

Étude de la qualité cristalline

Les cristaux que l’on trouve dans la nature ou qui sont élaborés par l’homme ne sont pas toujours parfaits et contiennent même beaucoup de défauts qui peuvent correspondre à des déplacements atomiques individuels, à des variations de la composition chimique, à des défauts étendus de l’édifice cristallin (cf. CRISTAUX - Défauts dans les cristaux). La diffraction des rayons X est un outil de choix pour la mise en évidence des défauts.

Si un échantillon est constitué par le mélange de deux ou plusieurs phases cristallisées , la comparaison des intensités respectives des raies de diffraction caractéristiques de ces différentes phases à des étalons permet de faire l’analyse quantitative de l’échantillon.

Si l’échantillon est constitué par la dispersion de petits précipités dans une matrice, il est possible de mettre en évidence leur nature en étudiant la diffusion des rayons X aux petits angles , c’est-à-dire dans des directions voisines de celle du faisceau direct. L’intensité des rayons X diffractés par un milieu est en effet, ainsi que le montre l’équation (11), porportionnelle à la transformée de Fourier de la distribution de la densité électronique de ce nilieu. S’il s’agit d’un matériau en phase dispersée, la densité électronique dépend non seulement de la nature chimique, mais encore de la forme et de la répartition des précipités. Comme cette dernière n’est pas périodique, le seul pic de diffraction observé est au voisinage de l’origine. La méthode permet de déceler de très petits amas, constitués de quelques atomes seulement. Elle a été, en particulier, appliquée à l’étude de zones de précipités (zones de Guinier-Preston) dans les composés métalliques.

La mesure précise des paramètres cristallins permet par ailleurs d’évaluer le taux de défauts ponctuels ou d’impuretés introduites dans le réseau cristallin. La présence de ces défauts induit en effet une déformation de la maille que l’on peut mesurer par l’étude de la diffraction des rayons X. Ces résultats peuvent également être mis en évidence sur des topographies aux rayons X, véritables cartes permettant de suivre les variations locales du paramètre.

Beaucoup de matériaux sont mal cristallisés ou formés d’agrégats de petites cristallites. Ils peuvent manifester des orientations préférentielles (texture ), dans le cas de fibres textiles ou de tôles laminées, par exemple. Elles se voient immédiatement sur les clichés de rayons X: si les cristallites sont distribuées de manière statistique, le diagramme de l’échantillon est formé d’anneaux de Debye-Scherrer (fig. 11) parfaits; si, au contraire, ces anneaux sont ponctués, on en déduit la présence d’orientations préférentielles que l’on sait évaluer.

Les cristaux possèdent fréquemment des défauts étendus tels que les dislocations ou les fautes d’empilement qui jouent un rôle important dans la déformation plastique ou la croissance cristalline. La diffraction des rayons X permet de les mettre en évidence soit globalement par la modification qu’ils entraînent dans l’intensité réfléchie par l’ensemble du cristal, soit localement sur des «topographies aux rayons X». Le principe de l’une des méthodes topographiques est schématisé sur la figure 18. Un pinceau limité par une fente fixe f 1 est incident sous un cristal presque parfait et réglé sous l’incidence de Bragg. On montre, en théorie dynamique de la diffraction des rayons X, que les rayons voisins de l’incidence de Bragg excitent des champs d’ondes dans le cristal dont les trajets sont compris à l’intérieur du triangle ABC, entre le faisceau direct AB et la direction réfléchie AC. Ces champs d’ondes se divisent à la face de sortie du cristal en deux faisceaux, réfléchi Rh et réfracté Ro. La divergence du faisceau direct AB est, en général, supérieure à la largeur du profil de réflexion du cristal parfait et, si un défaut D se trouve sur son trajet, il pourra être réfléchi par les plans déformés au voisinage du défaut et donner naissance à une image i sur une plaque photographique Ph placée dans le faisceau réfléchi, par exemple. On montre que l’intensité globale réfléchie par une région du cristal déformée est supérieure à celle réfléchie par une région du cristal parfait. La position de l’image i du défaut dans la trace du faisceau réfléchi Rh permet d’en déduire la profondeur dans le cristal et l’on a ainsi une véritable coupe du cristal. Si l’on anime cristal et plaque d’un mouvement simultané T, chaque point du défaut donnera successivement une image et l’on obtiendra une topographie de l’ensemble du cristal, c’est-à-dire une projection des images de tous les défauts contenus dans le cristal sur la plaque photographique. La méthode des topographies a de très nombreuses applications car elle permet d’étudier les mouvements de dislocation lors de la déformation plastique, les défauts de croissance, les parois de domaines ferromagnétiques ou férroélectriques, etc.

Interféromètres à rayons X

En utilisant les propriétés de la propagation des rayons X dans les cristaux parfaits, il est possible de construire des interféromètres à rayons X. Le principe est schématisé sur la figure 19: on envoie un faisceau sous l’incidence de Bragg sur une série de trois cristaux parfaits, identiques et parallèles; dans le montage représenté, les plans réflecteurs sont perpendiculaires aux surfaces des cristaux. Les faisceaux incidents sur le troisième cristal, après avoir suivi les trajets TR et RR, interfèrent et engendrent un système d’ondes stationnaires dont la période des plans nodaux est la même que celle des plans réticulaires des deux premiers cristaux. L’intensité des faisceaux diffractés par le troisième cristal sera maximale et uniforme si celui-ci est parfait, à même distance réticulaire et avec la même orientation que les deux premiers, et si la position dans l’espace des plans réflecteurs coïncide avec celle des plans nodaux du systèmes d’ondes stationnaires.

Si le troisième cristal n’a pas tout à fait la même orientation ou le même paramètre que les deux premiers, on observera des franges de moiré dans les faisceaux émergents. Si le troisième cristal subit une légère translation (d’une fraction de la distance entre plans réticulaires) ou si l’on place une lame de phase sur le trajet de l’un des faisceaux incidents sur ce cristal (en L, par exemple), on observera un changement d’intensité.

L’interféromètre ainsi construit permet de mesurer des variations de paramètres de l’ordre de 10-9 nm, de déceler des déplacements du troisième cristal de l’ordre d’un dixième de nanomètre, de mesurer des indices de réfraction pour les rayons X, etc.

Microsonde électronique

Le principe de la génération des rayons X et de la diffraction sélective de Bragg est utilisé dans un appareil appelé microsonde électronique pour faire l’analyse chimique qualitative et quantitative d’un échantillon. Un pinceau d’électrons focalisé au moyen de lentilles électromagnétiques est envoyé sur l’échantillon à étudier. La dimension de la plage analysée peut être réduite à 1 猪m2 environ. Le faisceau de rayons X émis est analysé à l’aide d’un diffractomètre à cristal afin de déterminer les longueurs d’onde qui le constituent et, par suite, la nature chimique des éléments contenus dans la région étudiée de l’échantillon.

En comparant l’intensité des rayons X émis à celle qui est obtenue avec un échantillon standard, il est possible de rendre l’analyse quantitative. Cette méthode est très commode puisqu’elle est non destructrice et permet de suivre des variations locales de la composition chimique à la surface de l’échantillon. Elle a de nombreuses applications notamment en métallurgie et en minéralogie.

Diffraction des neutrons

Les applications les plus importantes de la diffraction des neutrons découlent de ses différences par rapport à celle des rayons X, ainsi qu’on peut le montrer par trois exemples:

1. À l’aide de la diffraction des rayons X, il est difficile de déterminer la position des atomes d’hydrogène dans les structures de composés hydrogénés , car le facteur de diffusion atomique de l’hydrogène est très faible. Au contraire, son amplitude de diffusion par les neutrons est comparable à celle des autres atomes. Il a été ainsi possible de déterminer la structure des hydrures de métaux lourds, de la glace des halogénures d’ammonium, du phosphate diacide de potassium KH2P4. Ce dernier cristal est particulièrement intéressant par suite de ses propriétés ferroélectriques et la diffraction des neutrons a apporté une contribution importante à leur interprétation structurale.

2. Lorsque plusieurs atomes ont des numéros atomiques voisins, il est difficile de les distinguer par diffraction des rayons X puisque leurs facteurs de structure sont également voisins. Par contre, ils ont en général des sections efficaces différentes pour les neutrons et il est possible de distinguer leurs positions. C’est un cas que l’on rencontre assez fréquemment avec les alliages. Il a été possible ainsi de montrer que l’alliage fer-cobalt FeCo est cubique centré à température ordinaire avec une répartition satistique des atomes de fer et de cobalt, mais qu’à température élevée cette structure s’ordonne, le réseau devenant cubique simple, les atomes de cobalt étant situés aux centres de cubes dont les sommets sont occupés par des atomes de fer.

3. Dans les composés ferromagnétiques ou antiferromagnétiques , par exemple, les spins s’orientent de manière ordonnée. Comme les neutrons sont également diffractés par les atomes possédant un moment magnétique, on a là l’outil de choix pour l’étude des structures magnétiques. La figure 20 montre, par exemple, la structure du fluorure manganeux Mn2 qui est antiferromagnétique. Le réseau cristallographique est quadratique simple. La diffraction des neutrons a permis de mettre en évidence l’orientation des moments magnétiques représentés sur la figure.

Étude de l’agitation thermique par diffusion inélastique des neutrons

Les atomes et les molécules dans la matière ne sont pas au repos, mais animés de vibrations thermiques autour de leurs positions moyennes d’équilibre. Ces mouvements peuvent être décrits par des ondes d’agitation thermique qui se propagent dans le cristal. Ces ondes peuvent être représentées par des particules appelées phonons de la même manière que l’on peut représenter les ondes électromagnétiques par les photons. L’agitation thermique joue un rôle fondamental dans un très grand nombre de propriétés de base des matériaux: chaleur spécifique, dilatation thermique, résistivité électrique, conductibilité thermique, etc. Certaines transitions de phase peuvent être interprétées à partir des modifications du spectre de l’agitation thermique au voisinage de la transition. Les ondes d’agitation thermique sont caractérisées par leurs courbes de dispersion, c’est-à-dire la manière dont leur fréquence varie en fonction de leur vecteur d’onde, en d’autres termes, par la variation de l’énergie des phonons associés à ces ondes en fonction de leur moment.

L’une des meilleures façon d’étudier les propriétés des phonons est d’étudier le résultat de leur interaction avec des particules incidentes, photons, neutrons ou électrons. Au cours de ces interactions, il y a transfert de quantité de mouvement et d’énergie entre les phonons et les particules incidentes, l’énergie totale et la quantité de mouvement totale étant naturellement conservées. Les énergies de phonons sont de l’ordre d’une faible fraction d’électronvolt et sont, par conséquent, de même ordre de grandeur que celles des neutrons mais beaucoup plus petites que celles des photons ou des électrons. Il est donc beaucoup plus facile de mesurer le changement d’énergie subi par les neutrons que celui subi par les photons; les neutrons constituent donc un excellent outil pour l’étude de la dynamique cristalline.

Diffraction des électrons rapides

La diffraction des électrons peut se faire soit par transmission, soit par réflexion. C’est le premier cas, illustré par la figure 8, qui est le plus fréquent. Par suite de la très forte interaction des électrons avec la matière, leur pénétration est faible, et l’on est limité à l’étude de lames minces dont l’épaisseur va de quelques centaines de nanomètres pour les microscopes électroniques habituels, travaillant avec une tension d’accélération de 100 kV, à quelques micromètres pour les microscopes, encore très peu nombreux dans le monde, travaillant sous plus d’un million de volts. Cette faible pénétration des électrons conditionne la nature des préparations que l’on peut étudier.

L’étude des échantillons se fait soit en diffraction soit en microscopie. Comme il est possible de focaliser le faisceau d’électrons, elle peut se faire sur une plage de dimensions très réduites (de l’ordre du micron carré). Si la nature des renseignements apportés par la diffraction des électrons est la même que dans le cas des rayons X, on voit qu’elle pourra s’appliquer à des échantillons extrêmement petits ou à de petits grains dans un échantillon massique: détermination de différentes phases, de l’orientation des cristaux, etc. Cette technique a suscité beaucoup d’applications, notamment en métallurgie.

La diffraction des électrons permet, comme celle des rayons X, de déterminer les structures cristallines et, dans certains cas, elle est plus commode. La diffraction des électrons de faible énergie (quelques dizaines de volts) est par ailleurs très intéressante pour l’étude des surfaces cristallines. Leur pénétration est en effet limitée dans ce cas à une ou deux couches atomiques et l’observation se fait par réflexion. L’étude des surfaces cristallines a de nombreuses applications, notamment pour l’interprétation des phénomènes de catalyse hétérogène.

L’observation en microscopie permet l’étude de la forme des cristallites, mais surtout celle des défauts réticulaires qu’elles contiennent. Le pouvoir séparateur est de quelques dixièmes de nanomètres et il est par suite possible d’étudier des cristaux contenant beaucoup de défauts et de suivre la création de ceux-ci sous l’action d’une déformation, par exemple, ou d’une irradiation. Il est possible également de mettre en évidence des précipités et d’en déterminer la nature chimique et cristalline.

Diffraction des électrons lents

Les électrons accélérés sous une faible tension, de l’ordre de quelques dizaines ou quelques centaines de volts, ont une interaction tellement forte avec la matière, qu’ils ne peuvent y pénétrer au-delà d’une profondeur d’une à deux distances interatomiques. La diffraction des électrons lents est donc une technique privilégiée pour l’étude de la structure de la surface des cristaux. Cette structure est pas toujours identique à celle du matériau dans la masse et peut subir des modifications lorsqu’une substance étrangère est adsorbée à la surface du matériau, comme c’est le cas dans la catalyse hétérogène.

Depuis l’expérience fondamentale de 1912, les méthodes utilisant la diffraction des rayonnements se sont développées de manière considérable et ont reçu un nombre sans cesse grandissant d’applications. Par leur très grande variété, elles sont devenues un outil de choix pour l’étude des matériaux dans tous les domaines de la science.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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